"AU PAYS"

Un très grand livre de Tahar Ben Jelloun à placer dans la bibliothèque idéale


Rencontre Tahar Ben Jelloun et Edmond Morrel (26.8 Mo)

"Au Pays", le nouveau roman de Tahar Ben Jelloun s’inscrit d’emblée dans une bibliothèque idéale, celle où l’on place les livres qui transforment notre vision du monde.

Lorsque je l’ai refermé, je n’ai pu m’empêcher de songer au premier livre qui avait fait connaître le romancier en France : « La plus haute des solitudes ». C’était un essai sur l’immigration marocaine en France à la fin des années 60. Aujourd’hui, avec ce roman, l’auteur revient à cette thématique à travers le personnage central de votre roman, Mohamed, qui reçoit le 5 septembre 1962 son passeport pour la France…

De Mohamed, nous ne savons pas le nom…La dernière phrase du livre le désigne par l’état dans lequel il a vécu jusqu’à sa retraite : l’immigri…Un état pas une identité ? C’est peut-être cela l’essentiel de ce qu’il a perdu…

Arrivé à la retraite, qu’il appelle « l’entraite », dont il a peur…Mohammed fait le bilan de sa vie. Ce point de vue que Tahar Ben Jelloun adopte n’est pas vraiment un « flash back », mais plutôt le cheminement en volutes de la songerie de Mohamed. Cette approche romanesque se traduit dans une langue et un style littéraires très particuliers. On y passe du « je » au narrateur universel, puis dans la perception, à la première personne aussi, d’autres protagonistes vers lesquels Mohamed nous entraîne au fil des songeries. Le roman permet aussi de percevoir la complexité des choses…Ici, d’une certaine manière nous ressentons au plus près du cœur le désarroi d’un homme simple qui, dans l’immigration, a perdu l’essentiel : les valeurs simples qui l’ont guidé, ses enfants éparpillés dans leurs vies nouvelles, la compréhension de sa vie.

Sa vie, c’est l’immigration. Le jour du départ vers la France, le guide qui accompagne le groupe de marocains leur tient un discours vertigineux : « il vaut mieux vous préparer à entrer dans un monde totalement inconnu, c’est comme dans un rêve où nous ne sommes plus nous-mêmes ».

De l’immigration Tahar Ben Jelloun adopte le point de vue de l’ « émigré »…c’est vers ses sources, ses origines qu’il choisit de repartir…mais le retour non plus n’est plus possible…le pays d’origine devient aussi « un rêve où nous ne sommes plus nous-mêmes » ?

« Au pays » est aussi un très grand roman par les personnages qu’il nous donne l’occasion de rencontrer, comme Nabile, le plus attachant d’entre eux, un enfant trisomique, « un don de Dieu, une lumière dans sa vie , c’est un ange ». Il et peut-être le double, le miroir de Mohamed… ?

Il y a aussi les enfants de Mohamed…cette « deuxième génération », ces enfants qui vont leur chemin et laissent Mohamed impréparé à cette déchirure qui va le briser…Le prix à payer pour le métissage et l’intégration donne un dernier chapitre du livre écrit dans un onirisme à couper le souffle…

Ce roman est un grand livre. Il donne à ressentir davantage qu’à connaître, et gageons qu’il transformera durablement le regard que nous porterons dorénavant sur Mohamed, sur ses enfants, sur son neveu Nabile, sur son pays, sur sa culture et sur ses valeurs.

Edmond Morrel

Quatrième de couverture :

À quelques mois de la retraite, Mohamed n’a aucune envie de quitter l’atelier où il a travaillé presque toute sa vie depuis qu’il est parti du bled. Afin de chasser le malaise diffus qui l’envahit, il s’interroge sur lui-même avec simplicité et humilité. Il pense à son amour profond pour l’islam, dont il n’aime pas les dérives fanatiques ; il se désole de voir ses enfants si éloignés de leurs racines marocaines ; il réalise surtout à quel point la retraite est pour lui le plus grand malheur de son existence.
Un matin, il prend la route de son village natal, décidé à construire une immense maison qui accueillera tous ses enfants.
Un retour « au pays » qui sera loin de ressembler à ce qu’il imaginait.

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