Quand Philippe Geluck se lâche, c’est comme un clown qui se démaquille. Devant le miroir, dans la lumière éblouissante des spots, il laisse aller sa rêverie. Parfois, elle le conduit à s’indigner, à pousser l’absurde jusqu’au noir, une couleur semblable à celle que Franquin explorait à la fin de sa vie. Mais, heureusement pour nous, (et pour lui), Geluck a toujours, à portée de crayon, son gros chat qui veille au grain…Un garde-fou (que le mot désigne bien la chose !) qui de temps en temps se penche sur le clown démaquillé, lui tape sur l’épaule et lui glisse à l’oreille « allez mon vieux, au boulot maintenant… On n’en a pas fini nous trois…toi, le monde et moi… ».
En attendant, Philippe Geluck a pu se lâcher dans ce livre qu’il revendique comme inconvenant, et c’est de la plus roborative inconvenance qu’il s’agit : celle qui empêche l’assoupissement, qui fait du rire une arme (le chat dirait « le péril jaune »), qui nous laisse souvent pantois devant l’évidence.
Un livre à placer dans notre bibliothèque idéale entre les œuvres de Woody Allen, quelques DVD des Marx Brothers, les Essais de Montaigne et les « Idées Noires » de Franquin. Avec de la lumière en plus, au bout du tunnel…
Un livre qui rappellera aux fidèles de la première heure les petits albums que Philippe Geluck publiait naguère au « Daily Bul » et les aquarelles sombres des débuts… Il nous en parle dans cet entretien qui donne envie, si besoin en était, d’ouvrir toutes affaires cessantes le dernier opus de Geluck et d’espérer un jour une publication de ses œuvres de jeunesse…si le Chat y consent.
Ecoutez Geluck, puis courez chez votre libraire...
Edmond Morrel