Le texte de ce monologue, adapté du recueil de nouvelles de Boulgakov, écrit entre 1919 et 1921, se veut le récit de la première année d’un jeune médecin, fraîchement diplômé qui se retrouve au fin fond de la campagne russe.
Peu assuré face à l’ombre pesante de son prédécesseur, il cherche à tâtons sa légitimité. Ainsi, le comédien hésitant prend son texte avec lui pour ne finalement pas y jeter un oeil, tel Boulgakov qui s’éloignera rapidement de ses livres de médecine pour se confronter au réel de sa fonction : de l’amputation à l’arrachage de dent, c’est dans le concret qu’il évoluera. Il comprendra qu’il ne faut cesser « d’apprendre humblement », conseil asséné comme point de clôture de cette pièce à la mise en scène sobre.
Les lumières pleins feux sur le public, faisant du gradin la continuation du plateau, nous sommes les convives du repas où le simple Mikhaïl livre ses souvenirs. Ou les spectateurs d’une conférence du docteur Boulgakov sur les pratiques de la médecine. Oscillant entre ces deux registres – protocole de soins aux traits d’humour et aveu intime de rencontres et de doutes – la mise en scène d’Alexandre von Sivers se veut légère et subtile. Offrant à son comédien un plateau relativement vide, l’essentiel est porté sur cette présence, cette voix, ces lueurs du regard qui nous font vivre avec sensibilité ces souvenirs émus.
Et pourtant ces rares objets, ce jeu sobre nous font voyager jusqu’à la profonde Russie. A peine une table et une nappe posées devant les briques des murs du théâtre lui-même et nous nous sentons emportés au fin fond de sa mémoire, au coeur de cet hôpital de fortune.
Des histoires parmi tant d’autres. Ni général ni universel, de la pure anecdote en simplicité et légèreté. Mais surtout le pouvoir de nous faire voyager sans artifice.
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