Pourtant, les frissons étaient garantis...

La premère séquence permet d’établir une hiérarchie entre les trois malfrats. A la recherche d’une poupée précieuse, Roat, gangster machiavélique, impose un marché à Mike et à Carlino. Ceux-ci, trop naïfs, se sont fait piéger par leurs empreintes digitales et sont condamnés à devenir ses complices. Cette mise en route verbeuse s’étire et est heureusement interrompue par l’arrivée d’une jeune aveugle, qui rentre chez elle. Suzy a perdu la vue accidentellement et forme avec Sam un couple joyeux. Ce photographe dynamique incite constamment sa "petite championne" à surmonter son handicap. Après cette scène radieuse, la petite souris aveugle va devoir affronter trois chats sournois...

La pièce est nettement datée et le metteur en scène en en est bien conscient : " Il m’a semblé que la gageure principale était de faire passer ce genre de situations, quarante ans après sa création, à l’ère du téléphone portable, des E-mails et de tous les films violents, dont nous sommes abreuvés." (Toni Cecchinato).
Certes, les progrès technologiques rendent caduques certaines péripéties. Mais on replonge facilement dans les années 60 et on accepte le flash-back. En revanche, la plupart des scènes violentes manquent de crédibilité. Sans tomber dans les excès du Grand-Guignol, on aurait dû rendre les agressions plus authentiques, plus stressantes. Desserrant l’étau qui emprisonne Suzy, une série de maladresses font baisser la tension dramatique. Dès qu’une scène se termine, on attend l’intervention d’un nouveau personnage et le décor nous permet de le repérer, avant qu’il ne franchisse la porte. De ce fait, le rythme de la représentation est trop souvent "pépère". En prenant du plaisir à jouer un rôle dans cette "aventure", la petite Gloria la dédramatise. Pour que le public perçoive mieux leur perfidie, Mike et Carlino adoptent un ton artificiel. On s’étonne qu’une aveugle, à l’ouïe fortement développée, ne le remarque pas. Quant au coup de théâtre, point d’orgue de ce cauchemar éveillé, il aurait dû exploser au milieu d’ un noir total.

Dans son duo avec Sam, à qui Bernard d’Oultremont insuffle punch et vivacité, Stéphanie Moriau suggère sobrement l’impatience, le manque de confiance et la vulnérabilité d’une accidentée, qui apprivoise sa cécité. Une mise en scène plus resserrée, plus rigoureuse et plus énergique aurait pu transformer son personnage en victime émouvante et rendre les malfaiteurs plus menaçants que maladroits. Comme les vraies crapules qui pimentaient certains films d’Hitchcock, dans les années 60-70.

Jean Campion



 

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