Joyeux poulailler ! mais la psychose laisse à désirer...

Ingéniosité et mouvement. Deux échaffaudages à un étage, tantôt ouverts pour se muer en espace privé (une chambre, un salon...), tantôt grillagés pour figurer le poulailler (ou la prison du langage...), tournoient sur scène, accessoirisés efficacement au fil des saynètes qui se succèdent et qui, toutes, proposent une mise en scène particulière des multiples difficultés que l’Homme éprouve à dire et à se dire et dont il est, irréversiblement, la proie. Les comédiens tirent le meilleur de leur conception scénographique en en accentuant sans cesse la mobilité : ils occupent le plateau seuls ou ensemble, entrent et sortent de scène sans relâche et se meuvent sur leur tribune comme sur des espaliers de gymnastique. La machine, surtout pour une première, est décidément bien rôdée !

Complicité et énergie. On avait déjà pu voir Julie Lenain dans « Et sans ciel ? » à la Soupape. Ses compagnons de jeu d’alors, cette fois, n’étaient pas sur scène, mais ils étaient dans la salle ! L’un d’eux confirme, après le spectacle, qu’ils se sont tous liés d’amitié durant leurs études au Conservatoire et qu’ils ont développé, de concert, de grandes affinités artistiques. Le plateau transpire de cette heureuse proximité. Chaque comédien y a d’emblée sa place, aucun ne vole la vedette, tous y trouvent de vrais partenaires de jeu : ils s’écoutent, ils s’attendent, ils sont en phase. Leur prestation y gagne tant en spontanéité qu’en équilibre, tant en plaisir qu’en énergie.

Névrose ou psychose, docteur ? La qualité de jeu, elle non plus, ne laisse pas à désirer. Les comédiens – et, parmi eux, les deux auteurs du spectacle - maîtrisent les stéréotypes qu’ils exploitent et jouent clairement la carte du second degré. Cela dit, se jouer des stéréotypes sans tomber dans les lieux communs est un défi artistique en soi qui, ici, n’a pas réussi à être relevé. Un trop grand nombre de saynètes présentent des situations de communication éculées dont le traitement, s’il n’empêche le rire, manque cruellement d’originalité : la réunion de famille qui tourne au vinaigre après le décès de la matriarche, l’hystérique qui se répète au téléphone, le mari qui n’écoute pas ce que dit sa femme, le couple qui se comprend au moment de se séparer... Le fond intellectuel sur lequel repose le prétendu concept de la pièce est malheureusement trop flou pour sauver la donne : un peu de névrose, un peu de psychose, un peu de Freud, quelques poncifs littéraires, quelques jeux de mots et, malheureusement, un peu trop de vent... Le comique ne vaut-il pas tout autant, sinon plus, quand il émerge d’une réflexion théorique aux assises plus sérieuses ?

Karoline Buchner



 

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