La Famille, un creuset nécessaire

Un à un, des personnages montent sur le plateau. Le premier à parler est Filippo. C’est un jeune homme un peu coincé, mais très heureux. Il a eu la chance de rencontrer Anna, qui a quinze ans comme lui. Les ados veulent se marier. Devant ce projet, Mamma, mère d’Anna, pique une terrible colère. Son mari trouve, au contraire, que si ce mariage tourne au fiasco, Anna aura encore le temps de refaire sa vie. Une opportunité qu’il n’a plus....Vincenzo, le beau-père de Filippo, couve sa mère Nonna Anna, qui perd la mémoire et nous annonce sereinement qu’il est atteint d’un cancer incurable. Sa fille Caterina est une jolie rousse, complexée par la puanteur, qu’elle est persuadée de dégager.

C’est Ezio, l’auteur, qui donne vie en direct aux membres de ces deux familles. Et quand il les néglige, pour raconter ses propres aventures, ceux-ci protestent vigoureusement. Un accident de vélo le mêle à ses personnages et le propulse dans sa fiction. A mi-chemin entre roman et théâtre, "Happy family" combine habilement interventions du narrateur, dialogues courts, grande scène de groupe et monologues qui révèlent au public les questionnements intimes des personnages. Ezio, alter ego d’Alessandro Genovesi, prend plaisir à raconter très librement une histoire pleine de fantaisie, en passant brutalement du rire à l’émotion. Avec légèreté et délicatesse. Parfois ses personnages semblent lui échapper pour nous confier leurs névroses, leurs craintes ou leurs espoirs.

Par sa mise en scène sobre et précise, Dominique Pattuelli maîtrise remarquablement cette forme hybride et exploite à bon escient les changements de rythme et de ton. Dans un cadre nickel, image lisse de notre société, la plupart des personnages restent sur scène, à la disposition de l’auteur, mais aussi capables de le contester. Les coups de gueule de la volcanique Mamma (Florence Roux) contrastent violemment avec la pudeur mélancolique de Vincenzo (Hervé Dubois) ou la fragilité maladive de Caterina (Audrey D’Hulstère). Pourtant ces êtres humains sont unis par "le besoin d’amour et les angoisses générées par leurs peurs." Un dénominateur commun souligné par l’homogénéité de l’interprétation.

Ni vraiment réaliste, ni vraiment décalée, "Happy family" est une fable étrange. Une invitation à nous interroger sur l’amour, le rôle capital de la famille et la difficulté d’exorciser nos peurs. C’est également un spectacle qui nous réjouit par sa capacité à nous surprendre.

Jean Campion



 

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