Le dernier roman d’Anne Plantagenet est envoûtant. Il nous hypnotise par le style, il nous happe à la première ligne et ne nous lâche qu’à la dernière avec cette sensation que procurent les grands livres : nous ne sommes plus les mêmes après ce livre qu’avant.
C’est une sensation que l’on éprouve rarement et qui réconcilie avec la littérature. Stendhal disait du romanesque que c’est un miroir placé le long du chemin que l’on parcourt.
Ici, le miroir est éclaté en autant de personnages qui gravitent dans la quartier Pigalle, devenu pour la circonstance, le microcosme de la société urbaine européenne. Le miroir est éparpillé aussi devant chacun des personnages dont on explore, avec la romancière, la géographie mystérieuse et inquiète, l’histoire indicible et implacable, les méandres des compromis qui aident à vivre, des lâchetés qui sont le viatique du quotidien.
A partir de chaque personnage, Anne Plantagenet développe un point de vue différent sur l’ensemble de la fresque dans laquelle elle fait évoluer Thimothée, Louisa, Vincent et les autres. Elle invente un espace romanesque où, à l’instar de Simenon, elle ne juge pas ; à l’instar d’Aragon, elle sait qu’il faut mentir pour dire le vrai.
Un grand roman qui nous laisse ému devant le miroir éclaté des villes et des êtres.
Edmond Morrel
Anne Plantagenet nous lit un extrait de "Nation Pigalle", une des harangues du "Poète" un personnage central du roman.