Le Rire, un aiguillon pour philosopher

Maniant avec aisance une langue d’adultes cultivés, deux nouveau-nés font connaissance, commentent leur accouchement et s’interrogent sur l’intérêt de l’existence. Le garçon et la fille ne manifestent pas le même appétit de vivre. Cependant, même s’ils trouvent humiliant de devoir réclamer la tétée, ils ont soif et hurlent avec les autres nourrissons : "On veut des grosses tototes !"

Le ton est donné. En nous plongeant dans une série de situations cocasses et saugrenues, l’auteur se moque des contradictions, des préjugés, des névroses, des frustrations et des fêlures qui rendent l’homme vulnérable. Une cellule d’anarchistes, qui se chamaillent à coups de statuts et de règlements, se condamne à une impuissance risible. Peut-on exiger la sérénité dans une réunion d’"Antipathiques anonymes" ? C’est ce que croit naïvement une psychologue zélée.

Les duels sont tout aussi drôles. Comme cet affrontement à fleuret moucheté entre le "rationnel", qui traverse, en une demi-heure, une exposition de tableaux contemporains et la "passionnée" qui prend le temps de ressentir des vibrations artistiques. Ou encore le déballage cynique d’un homme et d’une femme qui se livrent au jeu cruel de la vérité.
S’il a la dent dure, Dominique Bréda est attaché à ses personnages "qui sont comme nous, lâches, irrationnels et timides.". Ainsi, stupéfait d’apprendre que son collègue est juif, le personnage campé avec une maladresse savoureuse par Thomas Demarez va multiplier les clichés et les gaffes. Jusqu’à excéder cet ami, en voulant lui prouver qu’il n’est pas antisémite.

Un des atouts majeurs de "Purgatoire" est son rythme soutenu. Pas de longueur ni de flottement entre les scènes mais des dialogues incisifs, servis par des comédiens pleins d’ardeur. Encadrés par une mise en scène sobre, ils font vivre ces personnages insolites avec justesse. L’irruption brutale de la Mort fait souffler un vent de folie. En douanière de l’au-delà, Julie Duroisin se déchaîne. Avec une ironie grinçante, elle dénonce la mesquinerie et la lâcheté de ceux qui vivotent dans leur confort. Et voilà que ce rôle de donneuse de leçons se dilue rapidement dans une crise de nerfs contre les ordinateurs. Son allergie à l’informatique l’amène à bousculer injustement sa secrétaire. Un affrontement que les mimiques de Catherine Decrolier rend hilarant. Cette scène désopilante, pimentée de clins d’oeil, couronne un spectacle subtil et joyeux.

Jean Campion



 

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